FFL d’Or 2021 #2 : France-Suisse Euro 2020, le bijou de Bucarest


France Suisse

«Le ballon, les Suisses vont pas le voir. Ils vont avoir quelques contres, de temps en temps… Je ne vois pas comment les Français peuvent perdre ce match, à moins que les Bleus restent coincés dans l’ascenseur, avant de partir.» Comment pouvait-on entamer cet article autrement que par le coup de flair légendaire du 5e lauréat des FFL d’Or 2021 ?

Car oui, même si Raymond a (malheureusement pour la FFL) a repris sa retraite, ce match fut une affaire de tactique, mais pas que. Avant de mettre à l’honneur la partition parfaite de DD et ses joueurs, revenons à la racine d’une désillusion historique. Un chef d’oeuvre en 3 actes emballement-espoir-liquéfaction comme on n’en fait plus. Retour sur le bijou de Bucarest.

Acte 1 : L’emballement

2021. La France est championne du Monde de football en titre et ne s’est plus arrêtée avant la finale d’une compétition internationale depuis 2014. Forte de ce titre, l’équipe de France figure naturellement parmi les favoris de l’Euro. La mousse monte et atteint son point culminant le 18 mai, jour où Didier Deschamps annonce la liste des 23 joueurs sélectionnés pour disputer l’Euro. Lors d’une émission en prime time dont la mise en scène n’a rien à envier aux Oscars, nous découvrons que DD rappelle le leader du Real Madrid Karim Benzema, aux côtés de 14 champions du Monde 2018. Tout le monde en parle, vraiment tout le monde.

Au sommet de son art avec le Real, le numéro 9 merengue est destiné à compléter un trio d’attaque d’exception aux côtés d’Antoine Griezmann et Kylan Mbappé. 60 buts à eux trois en championnat en 2021. Ça ne peut que faire mal. Comment ne pas faire au moins une finale avec une force de frappe aussi puissante ? La France bouillonne.

Face à cet emballement national, la FFL fait tout son possible pour avertir le pays qu’un remake du fiasco 2002 est à prévoir. Mais alors que les preuves sont implacables, personne n’a envie d’écouter les rabat-joie que nous sommes.

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Devant cette sélection française aux allures de dream team, nos médias décident toutefois de la jouer sobre et misent sur la prudence.

Puis l’Euro commence. La France sort non sans peine première du groupe de la mort composé de l’Allemagne, du Portugal et de la Hongrie. Même après cette phase de groupe poussive lors de laquelle les Bleus alternent entre fulgurances et lacunes, le climat semble serein. En même temps, les joueurs de DD héritent de la Suisse en 1/8 de finales. L’aubaine.

Nous avons donc d’un côté la France, championne du monde propulsée par sa GMB. De l’autre, la Suisse qui n’a pas gagné un match à élimination directe en compétition internationale depuis 1938 et dont le meilleur joueur est tennisman. Rien ne peut arriver aux Bleus. La FFL déplie donc sa plus belle chaise longue et place un sachet de popcorn au micro-ondes. C’est parti.

Acte 2 : L’espoir

La première pierre à l’édifice est posée 1 heure avant le coup d’envoi. Didier Deschamps, qui a vraisemblablement perdu un pari dans les vestiaires, aligne une composition dont l’efficacité et la durée de vie ne seront probablement jamais battues :

Le match est lancé et rapidement, ce France-Suisse prend des allures de Coupe Davis 2014. 15e minute, Haris Seferovic s’élève dans les airs et se détache du marquage en chat-bite de Lenglet pour venir croiser sa tête et donner l’avantage aux siens. La Suisse a beau avoir donné naissance à l’Emmental, c’est bien la France qui est pleine de trous. Le 3-5-2 de DD vit déjà ses derniers instants.

En 2ème mi-temps, alors que la Suisse peut prendre le large, un événement aussi rare qu’une éclipse saturnale se produit : Hugo Lloris arrête un pénalty avec l’équipe de France, une première depuis 2012. Puis la magie KB9 opère : l’homme fort du Real plante un doublé en 2 minutes, suivi d’un pion de Pogba 15 minutes plus tard. Les Bleus se retrouvent avec une avance de deux buts à 15 minutes du terme. La France bascule dans l’euphorie. Oublié le Covid, tout le monde s’enlace, même l’action OL Groupe remonte.

France Suisse

Place au chef-d’oeuvre.

Acte 3 : La liquéfaction

La France mène 3-1 face à la Suisse. En ayant marqué un but, la Nati a déjà égalisé son total de buts marqués sur l’ensemble des matchs à élimination directe qu’elle a disputés depuis 60 ans. On devrait donc être tranquille.

Heureusement pour la FFL, à la 81e, Kimpembe et Varane décident de rendre un vibrant hommage au soldat Lenglet, sorti à la pause, en appliquant une air-défense à la culotte sur Seferovic. Tête du Suisse, 3-2. Les fessiers tricolores se resserrent. Plus que 9 minutes à tenir.

À la dernière minute du temps règlementaire, Pogba, dont les dernières énergies sont visiblement passées dans la chorégraphie du 3-1, tricote au milieu de terrain et se fait chiper le ballon, puis le contre est lancé par Xhaka. Le Gunner, qui réalise son premier bon match depuis 2009, sert Gavranovic. Ce dernier procède avec succès à une ablation de la hanche droite de Kimpembe avant de fixer Lloris d’un petit bonbon de tir croisé. Ça fait 3-3.

Pavard tentera de faire oublier son match en marquant, mais Sommer a la main ferme. Enfin, comme en 2016, les Bleus touchent les montants une dernière fois avant la prolongation. Les traditions, c’est important. Après le poteau de Gignac, la barre de Coman.

Cette main droite ferme de Yann Sommer, la FFL aura le plaisir de la retrouver 40 minutes plus tard lors de l’ultime tir de la séance de penalties, à l’occasion de la première frappe cadrée du match de Mbappé. Allez, on se la met une dernière fois avec les commentateurs suisses :

Conclusion

L’ascenseur a dû tomber en panne.


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