Lettre ouverte à Alpine


Esteban Ocon et Pierre Gasly.

Chère Alpine, nous avions besoin de t’écrire pour débuter notre thérapie. Certains experts disent que cela passe par l’écriture, alors rendez-vous au premier paragraphe.

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Alpine, nous ne t’avons pas vu venir

Les yeux encore humides, les cernes creusés, le regard vide, encore hagard de la veille. Voilà comment nous nous sommes réveillés ce matin, encore meurtris et humiliés par ton Grand Prix de la veille. La douleur est doublement vive car depuis le début de saison, la Formule 1 était notre refuge, notre zone de confort à la Française, notre safe place. Avec toi, nous avions le temps de voir venir, rassurés par l’énergie Clio 2 de tes voitures, tes stratégies douteuses en qualifications, tes arrêts sabbatiques aux stands, sans oublier les touchettes normando-normandes entre tes coéquipiers.

Bref tout était réuni pour que tu fasses de cette année 2024 un symbole de la lose tricolore, une saison pour l’éternité. Notre seul allié fidèle après des Jeux olympiques cataclysmiques pour la défaite bleu-blanc-rouge. Avec cette neuvième place au classement des constructeurs, les “derniers des autres” devant Sauber, tu faisais la fierté de la France tout entière. Chaque lundi d’après Grand Prix, notre meme “Pas mal non ? C’est Français” était déjà programmé.

Bref, tout allait bien jusqu’à ce sombre dimanche 3 novembre 2024.

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Les dimanches de F1 ne seront plus les mêmes à cause de toi

Pourtant, le Grand Prix du Brésil nous avait déjà prouvé qu’il savait ne pas être tendre avec nous. Le premier podium en F1 de Pierre Gasly en 2019 résonne encore dans notre tête, même cinq ans après et cette fichue montée wheel to wheel avec Lewis Hamilton. Mais comme on l’a dit, nous nous sentions invincibles cette saison. Même la quatrième position en qualifs d’Esteban Ocon n’a pas réussi à nous alerter. Le déni nous aveuglait, il n’y avait rien à y faire.

Puis la course débute, les tours défilent, et on comprend assez rapidement que la qualification d’Ocon est tout sauf un accident. Voir Leclerc et Verstappen buter durant de nombreux tours derrière le Français ne vient que confirmer notre crainte ; il va falloir serrer les fesses jusqu’à la ligne d’arrivée. D’autant plus quand le drapeau rouge permet à Pierre Gasly de monter provisoirement sur le podium. Résultat, une panique générale emporte les locaux de la FFL, digne de Michael Scott dans les bureaux de la société Dunder Mifflin.

Puis arrive cette heure fatidique : 19h00. Celle où tes pilotes franchissent en chœur la ligne d’arrivée aux 2e et 3e positions. Jamais plus nous ne regarderons les aiguilles d’une montre de la même manière lorsqu’elles indiqueront la 19e heure de la journée. Désormais, nos journées passeront directement de 18h59 à 19h01. La 1140e minute de la journée sera nulle et non avenue à compter de ce jour. Tant pis si Sept à Huit devra débuter à 19h01.

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Alpine F1 : six lettres, tout comme “trahison

Et le mot est faible. En une seule course, tu as effacé le travail colossal réalisé cette saison. En même temps, devons-nous être surpris de voir deux Normands exceller sous la pluie ? Finito la neuvième place au classement des constructeurs, tu jubiles désormais à la 6e position. Nous avons une tendre pensée pour la dizaine de supporters en France de Williams, Racing Bulls et Haas que tu as martyrisé devant leurs téléviseurs. Sachez que si vous lisez ces mots, nous savons ce que vous ressentez.

Finalement, nous aurions préféré nous trouver sous le déluge de Sao Paulo, au moins là-bas personne n’aurait deviné nos chaudes larmes couler le long de nos joues. Tes pilotes Esteban et Pierre viennent de stopper une série de 27 ans, et 519 Grands Prix, durant lesquels JAMAIS deux Français n’étaient montés ensemble sur le même podium. À l’époque, Olivier Panis et Jean Alesi avaient déjà terni le Grand Prix d’Espagne 1997. En espérant ne pas revivre cette journée avant 2051. D’ici là, on espère que la Q1 restera ton jardin, et que tes courses se dérouleront dans un anonymat total dans le ventre mou, quand tu les termineras.

Bien à toi.

La FFL.

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