Dortmund-Auxerre Ligue des Champions 1997 | Et Laslandes s’est envolé…


Lilian Laslandes

À l’occasion de la sortie de son affiche du Panthéon de la Lose, la FFL te propose de revivre les plus grandes désillusions du football français en Europe ou même dans le Monde.

« On m’en parle encore beaucoup de cette action. Parfois plus que les buts que j’ai marqués. » C’était juste trop beau pour être vrai. Qualifié pour les quarts de finale en Ligue des champions, le champion de France Auxerre se déplace à Dortmund. Juste avant la pause, menés 1-0 au Westfalenstadion après un but rapide de Lars Ricken, les Bourguignons veulent pousser le bouchon un peu trop loin. Et un homme, surtout : Lilian Laslandes.

Beaucoup trop en confiance, l’attaquant aux longs cheveux blonds, véritable D’Artagnan des temps modernes, voit le vénérable Alain Goma lui remettre un ballon idéal d’un bon coup de boule dans la surface. Le futur handballeur s’élance alors à un mètre du sol et claque un ciseau retourné. Bien trop parfait, et c’est là que M. Garcia Aranda intervient fort à-propos.

Charbonnier : « Pour moi, il y a toujours but ! »

Le défenseur Martin Kree très fort (vous l’avez ?) et l’arbitre espagnol, génialement dupé, annule le but aussi vite qu’il l’a accordé. Franck Silvestre se jette sur Laslandes pour l’enlacer, quittant à son tour le plancher des vaches. Mais ce dernier, tout en devant gérer les acrobaties de son capitaine en feu sur sa personne, comprend simultanément le drame qui se noue.

« Je me retourne et je vois l’arbitre siffler jeu dangereux, poursuit-il pour Footdavant.fr. Moi, sur le moment, je ne sais pas. C’est quand je vois les images après le match que je réalise que mon ciseau était valable. Guy Roux a fait un scandale. » Le menhir de l’AJA assure alors avoir « vu dix fois les images » et évoque « une mauvaise appréciation ». Jean-Michel Larqué, alors au sommet de son art, conteste Joël Quiniou qui tente tant bien que mal de voler au secours de son collègue ibérique (« l’arbitre n’a pas inventé ce pied en l’air »).


« Laslandes est le premier à déclencher, et il y a toujours avantage à celui qui attaque, rétorque ‘Jean-Mimi’, maniant les images du ralenti sur sa machine spatiale, mélange de Commodore 64 et d’Atari 800 (voir plus bas). Kree n’est pas au marquage, il est loin et se jette plus sur le pied que sur le ballon. A ce niveau, il sait très bien qu’il ne l’aura pas et il cherche la faute qu’il obtient. »

Le ballet collectif des joueurs du Borussia est sublime. Mention spéciale au gardien Stefan Klos, qui feint la perte d’un ami proche en se prenant immédiatement la tête à deux mains. En Allemagne, le cours Florent est depuis devenu le cours Stefan. « Je n’avais pas confiance en cet arbitre, il a été influencé par l’ambiance », insistait encore Guy Roux l’an dernier (pour RMC Sport). Suivi par son gardien Lionel Charbonnier : « Pour moi, il y a toujours but ! Si on le mettait, toute la physionomie du match était inversée. »

Roux demande à son ami Lulu « d’aller chercher son fusil »

René Schneider marquera le 2-0 peu avant l’heure de jeu – sur une deuxième passe décisive de Stéphane Chapuisat – et l’AJA reviendra à 2-1 grâce à Sabri Lamouchi (76e), avant le coup de grâce de ce diable d’Andreas Möller (3-1, 86e). Guy Roux préfère se souvenir (pour Ouest-France) « des restaurants sur chaque niveau du stade, de l’odeur des pommes de terres fumées et des pompes à bières ». Quitte à perdre, autant que ce soit autour d’une bonne ripaille…

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Affiche football FFL Panthéon de la Lose

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Avant le match retour, le grand manitou n’a définitivement plus aucun filtre (il s’exprime cette fois pour Sport24.com) : « La patronne de notre auberge me dit que des journalistes allemands sont dans la forêt avec des appareils photos. Je demande à mon ami Lulu d’aller chercher son fusil de chasse et deux cartouches. Il tire dans leur direction. C’était du plomb, ça va à 200 mètres. Eux étaient à plus de 500 mètres. » Presque…

« Je serais moi-même allé chercher le ballon »

Dortmund gagne 1-0 à l’Abbé-Deschamps, sur un nouveau but de Ricken. En vérité, Guy Roux avait quelque chose à perdre : son ballon. Il fait le tour du terrain en fin de rencontre, alors que le match continue. Et repart avec la sphère tant convoitée. « Si on ne l’avait pas rendu, je serais moi-même allé le chercher. Un stade ne doit pas être un exemple de terrain de vol, l’honnêteté doit régner. On donnera peut-être le ballon à un jeune, mais je ne peux pas admettre ça. Le jour où on volera le ballon d’Auxerre dans les tribunes, je n’en serai plus l’entraîneur. »

Deux mois après, Dortmund est champion face à la Juventus. Guy Roux croise M. Garcia Aranda dans les gradins à Munich : « Il m’a tendu la main pour me dire bonjour, j’ai laissé la mienne derrière mon dos. » L’Espagnol, mental infaillible, se signalera encore un an plus tard, en expulsant Laurent Blanc face à la Croatie en demi-finales du Mondial 98.