Le 7 juillet 2005, le réchauffement climatique ne semblait pas encore avoir commencé sur la route du Tour entre Troyes et Nancy. Pluie, froid, vent et même un semblant de brouillard accompagnent les coureurs sur les terres de l’Est. Les conditions sont exécrables et l’objectif de la majorité du peloton est de rentrer au chaud sans se vautrer. Mais pour Christophe Mengin, l’histoire est tout autre.
Régional de l’étape, Christophe avait coché ce 7 juillet depuis bien longtemps. En effet, à 37 ans, c’est potentiellement l’une des dernières occasions pour lui de briller sur le circuit professionnel, son palmarès se limitant jusqu’ici à un championnat de France de cyclo-cross et à une victoire d’étape à l’opposée de nos valeurs en 1997 à Fribourg, au nez et à la barbe de Vandenbroucke, Virenque et autre Pantani.
Décidé à rentrer le plus tôt possible pour prendre sa douche, Christophe Mengin sort du peloton dès le 23e kilomètre. Avec ses compagnons d’échappée, il comptera même jusqu’à 8mn30 d’avance sur le peloton, avant que les équipes de sprinters se mettent à se réveiller et à les chasser. Décidant de lutter contre ce destin, Christophe ne cesse d’attaquer et lâche ses compagnons d’échappée un à un. Suite à une nouvelle attaque dans la côte de Maron, dernière bosse de l’étape, il se retrouve seul – ou presque- avec la voix de Marc Madiot dans l’oreillette, en transe.
“Ne te retourne pas ! Pense à ta femme et tes gosses ! C’est maintenant ! C’est maintenant !”
Marc Madiot
À bloc dans le final, Christophe Mengin voit son avance fondre petit à petit. Lors de son passage sous la flamme rouge dans les rues de préfecture de Meurthe-et-Moselle, il sent le souffle de 2 poursuivants, Vinokourov et Bernucci, sortis du peloton revenir sur lui. Il ne peut absolument pas se relâcher et doit finir à fond pour conserver un espoir.
Christophe Mengin ou la presqu’victoire
Le dernier virage est un piège. Chaussée détrempée, angle à 90 degrés, Christophe prend tous les risques, glisse et se Mengin mur. Pleine barrière, il entraînera dans sa chute à la fois ses espoirs, mais aussi une bonne partie du peloton qui revenait à pleine vitesse. Devant, l’italien Bernucci profite du chaos et remportera sa seule victoire dans un grand tour.
Les 163,7 kilomètres d’échappée de Christophe Mengin resteront dans la légende de la FFL. L’exploit réalisé, il abandonnera le Tour 2005 le soir même, blessé lors de cette chute.
« Il y avait un kilomètre de trop, un virage de trop »
Christophe Mengin, juste après l’arrivée
Cette performance incroyable restera à jamais dans les mémoires françaises. D’ailleurs, Christophe Mengin fait même cette confidence à Vosges Matin :
“On me parle plus de ma chute à Nancy que ma victoire à Fribourg […] C’est une mentalité très française aussi que d’aimer les perdants magnifiques. Laurent Fignon est le coureur qui a perdu le Tour pour 8 secondes alors qu’il en a gagné deux avant. Poulidor était préféré à Anquetil, Virenque à Armstrong”
Merci Christophe, tu ne pouvais pas mieux résumer le concept de la FFL.